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PLUS-VALUE IMMOBILIERE ET DEMEMBREMENT : IMPOSITION PARTAGEE ET MODALITES DE CALCUL

Si en matière de plus-values de cessions de valeurs mobilières démembrées l’imposition n’est pas toujours partagée entre les titulaires des droits démembrés (l’imposition repose parfois exclusivement sur le nu-propriétaire ou l’usufruitier), il n’en va pas de même en matière de plus-values immobilières. Le partage de l’imposition de la plus-value afférente à un immeuble démembré est la règle !

Le nu-propriétaire ou l’usufruitier est redevable de l’imposition afférente à la cession de son propre droit (pour rappel, et sauf exceptions, les plus-values immobilières des particuliers sont assujetties à l’impôt au taux de 19% et aux prélèvements sociaux au taux global de 17,2%, après application d’un abattement pour durée de détention)

Toutefois, si la détermination du redevable est simple, il n’est pas possible de faire l’économie d’une lecture attentive de la documentation administrative afférente au prix de cession (BOI-RFPI-PVI-20-10-10 n° 270 et suivants), au prix d’acquisition (BOI-RFPI-PVI-20-10-20-10 n° 190 et suivants ; 320 et suivants), et à aux abattements pour durée de détention (BOI-RFPI-PVI-20-20 n° 40) pour déterminer précisément la plus-value imposable.

En synthèse, il convient de distinguer les hypothèses suivantes :

Hypothèse.1: Cession isolée de l’usufruit ou de la nue-propriété 

Dans cette hypothèse, une seule plus-value est générée. Deux situations peuvent se présenter:

 – Acquisition en pleine propriété d’un immeuble et cession d’un droit démembré : le propriétaire d’un bien immobilier en pleine propriété cède la nue-propriété ou l’usufruit de ce dernier à une tierce personne :

* Redevable : l’ancien plein propriétaire « néo-nu-propriétaire » ou « néo-usufruitier » ;
* Prix de cession : prix du droit aliéné (nue-propriété ou usufruit) ;
* Prix d’acquisition : fraction du prix d’acquisition de la pleine propriété afférente à ce droit.

Ce prix « fictif » est déterminé par application du barème de valorisation de la nue-propriété/de l’usufruit retenu en matière de droit d’enregistrement (article 669 du Code Général des Impôts), en tenant compte de
l’âge de l’usufruitier (ancien propriétaire « néo-usufruitier » ou acquéreur) au jour de la vente.

* Durée de détention/abattements : la durée de détention doit être décomptée à partir de la date d’acquisition du bien en pleine propriété.

Cession d’un droit démembré acquis isolément : un nu-propriétaire ou un usufruitier cède le droit qu’il possède :

*  Redevable : le titulaire du droit aliéné ;

*  Prix de cession : prix du droit aliéné (nue-propriété ou usufruit) ;

*  Prix d’acquisition : la détermination du prix d’acquisition ne pose pas de difficultés particulières, il s’agit de celui auquel il a précédemment acquis sont droit.

*  Durée de détention/abattements : la durée de détention doit être déterminée à partir de sa date d’acquisition.

 

Hypothèse.2 : Cession conjointe par le nu-propriétaire et l’usufruitier d’un immeuble démembré

Dans cette hypothèse, le nu-propriétaire et l’usufruitier cèdent chacun leur droit à un acquéreur qui acquiert la pleine propriété de l’immeuble, et se partagent le prix de vente.

Deux plus-values sont donc générées et reposent sur la tête de deux redevables différents : une plus-value au nom du nu-propriétaire et une plus-value au nom de l’usufruitier (chacun étant redevable de l’imposition afférente à la cession du droit dont il est titulaire).

Le prix de cession  :le prix de cession global payé par l’acquéreur pour l’acquisition de ces deux droits, et donc de la pleine propriété, doit être ventilé dans l’acte de façon à faire apparaître distinctement le prix de cession de ces deux droits en fonction de leur valeur réelle au jour de la vente. A titre pratique, il est possible d’opérer cette ventilation en appliquant le barème susmentionné de l’article 669 du CGI en tenant compte de l’âge de l’usufruitier au jour de la vente (cette ventilation peut également être opérée sur la base d’une valorisation économique de l’usufruit).

Pour la détermination du prix d’acquisition, il convient de distinguer deux hypothèses, en fonction de la situation du cédant, ces situations rejaillissant sur la détermination de la durée de détention pour l’application des abattements :

Le cédant (nu-propriétaire ou usufruitier) a acquis le droit isolément :

   *  Prix d’acquisition :

Acquisition depuis le 1er janvier 2004 : le prix d’acquisition est celui effectivement acquitté par le cédant ;

Acquisition avant le 1er janvier 2004 :

Par succession: le prix d’acquisition est déterminé à l’aide du barème susmentionné de l’article 669 du CGI en prenant en compte l’âge de l’usufruitier apprécié au jour de la cession du droit ;

Par donation: le prix d’acquisition est déterminé à l’aide de l’ancien barème de l’article 762 du CGI en prenant en compte l’âge de l’usufruitier à la date du démembrement.

*  Durée de détention/abattements : la durée de détention est décomptée à partir de la date d’acquisition du droit.

Le cédant (nu-propriétaire ou usufruitier) a acquis initialement l’immeuble en pleine propriété avant son démembrement :

*  Prix d’acquisition : le prix d’acquisition du droit cédé correspond à une fraction du prix d’acquisition initiale de la pleine propriété déterminée par application du barème de l’article 669 du CGI au jour de la cession.

*  Durée de détention/abattements : la durée de détention est décomptée à partir de la date d’acquisition du bien en pleine propriété.

 

Hypothèse.3 : Cession d’un immeuble après réunion de propriété

Dans cette hypothèse, le propriétaire d’un bien en pleine propriété le cède à un tiers acquéreur. Il ne disposait cependant, à l’origine, que d’un droit, nue-propriété ou usufruit, sur cet immeuble. Il a consolidé, sur sa tête, la pleine propriété du bien.

Le redevable de l’imposition est naturellement le cédant.

Le prix de cession correspond au prix stipulé dans l’acte, relatif à la pleine propriété du bien.

Quant à la durée de détention pour le calcul des abattements, elle est décomptée à partir de la première des deux acquisitions, qu’elles soient à titre onéreux, gratuit ou par voie d’extinction naturelle.

Exemple : en cas d’acquisition de la nue-propriété par donation et d’acquisition de l’usufruit au décès du donateur, le délai de détention est décompté à partir de la date d’acquisition de la nue-propriété.

Plusieurs hypothèses doivent être distinguées en ce qui concerne la détermination du prix d’acquisition :

Usufruit acquis par extinction : le cédant a acquis, à titre onéreux ou gratuit, la nue-propriété de l’immeuble qu’il cède. Il a « recueilli », par la suite, l’usufruit soit au décès de l’usufruitier, soit au terme de l’usufruit.

*  Prix d’acquisition :

En principe, en cas d’acquisition par extinction de l’usufruit, son prix d’acquisition est nul.

Cependant, l’administration fiscale admet de retenir comme prix d’acquisition la valeur vénale de chacun des droits, et donc de la valeur de la pleine propriété, à la date d’entrée de la nue-propriété dans le patrimoine du cédant.

Nue-propriété et usufruit acquis à titre onéreux: le cédant a procédé à l’acquisition de ces deux droits :

*  Prix d’acquisition : il est composé de la somme des prix d’acquisition de chacun des droits démembrés.

Nue-propriété acquise à titre gratuit (donation ou succession) et usufruit à titre onéreux :

*  Prix d’acquisition : il convient de retenir la somme de la valeur vénale de la nue-propriété retenue lors de la donation ou de la succession et du prix d’acquisition de l’usufruit.

Nue-propriété et usufruit acquis à titre gratuit (donation ou succession) :

*  Prix d’acquisition : il convient de retenir la somme des valeurs vénales retenues lors de chacune des donations et/ou successions.

La détermination de la plus-value afférente à la cession d’un immeuble dont la propriété est démembrée ou a été démembrée, ou d’un des droits afférents à cette propriété, nécessite donc un examen méticuleux.