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Les conventions de compte-courant d’associé sont-elles des conventions réglementées ?

Les conventions de compte-courant d’associé par lesquelles un ou plusieurs associé(s) prête(nt) de l’argent à la société dont il(s) est(sont) actionnaire(s), sont très régulièrement utilisées dans les sociétés par actions.

Ces sommes, mises à la disposition de la société, ne constituent pas des apports au sens juridique du terme, mais sont un véritable crédit consenti par l’associé à la société. Elles évitent ainsi à ladite société de recourir à un financement bancaire.

Du fait de leur caractère dérogatoire au monopole bancaire, ces conventions et leur recours sont strictement encadrés.

Aux termes des dispositions du Code de commerce, est soumise à la procédure des conventions réglementées, toute convention conclue entre une société par actions et un actionnaire détenant plus de 10 % des droits de vote (C. com. art. L.225-38, L.226-10 et L.227-10), sauf si elle porte sur une opération courante et sauf si celle-ci a été conclue à des conditions normales (C. com. L.225-39 al.1, L.225-87, al. 1 et L.227-11).

La question se pose donc de savoir ce que le législateur, comme la doctrine ou les juridictions entendent par « opération courante » et « conclue à des conditions normales ».

Il est ainsi généralement admis que les avances en compte-courant consenties par des actionnaires à leur société ne sont, par principe, pas des opérations courantes, puisque l’objet d’une société n’est pas de recevoir des fonds du public pour son financement, à moins que les statuts de la société ne mentionnent cette faculté et que celle-ci soit pratiquée habituellement ou que l’avance soit conclue entre sociétés d’un même groupe.

– Par « opérations courantes », il faut ainsi entendre les opérations effectuées par la société dans le cadre de son activité ordinaire et, s’agissant d’actes de disposition, arrêtées à des conditions suffisamment usuelles pour s’apparenter à des opérations habituelles ( com. 1-10-1996). Pour juger du caractère courant d’une opération, les tribunaux se réfèrent généralement à sa conformité à l’objet social (CA Paris 4-6-2003 n° 02-4255), mais ils doivent également vérifier que l’opération concernée est de même nature que d’autres opérations déjà effectuées par la société (Cass. com. 21-4-1977).

– Les conditions peuvent être considérées comme normales lorsqu’elles sont habituellement pratiquées par la société dans ses rapports avec les tiers de telle sorte que l’intéressé ne retire pas de l’opération un avantage qu’il n’aurait pas eu s’il avait été un fournisseur ou un client quelconque de la société. Il faut aussi tenir compte des conditions en usage pour des conventions semblables dans d’autres sociétés ayant la même activité (Rép. Lebas : AN 3-4-1969 n° 4276). Ainsi, dans certaines sociétés, notamment les sociétés familiales ou faisant appel au financement participatif, ce mode de financement pourra par exemple relever d’une pratique courante et être jugé habituel.

En conséquence, le caractère courant et normal d’une convention d’avance en compte-courant s’apprécie par rapport à la société concernée, qu’il s’agisse de son objet social, de la présence ou non d’une clause statutaire prévoyant le recours à de telles avances, ou encore si pour ladite société, et quand bien même l’opération serait habituelle pour son activité, celle-ci ne serait pas unique et isolée pour ladite société (Cass. com. 11-3-2003 n° 01-01.290).

Par prudence et pour éviter toute remise en cause de la convention, nous recommandons de systématiquement considérer les avances en compte-courant comme des conventions règlementées et de les soumettre, en conséquence, à la procédure applicable en fonction de la forme sociale de la société concernée.