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Contrôle du crédit d’impôt recherche par les agents du ministère chargé de la recherche et de la technologie : Quand le Conseil d’Etat siffle la fin de récré !

Le crédit d’impôt recherche (ci-après « CIR ») est un dispositif fiscal de soutien aux activités de recherche et de développement des entreprises et d’incitation fiscale au développement de l’effort de recherche scientifique et technique des entreprises. En application de l’article 244 quater B du CGI, les entreprises industrielles et commerciales ou agricoles imposées d’après leur bénéfice réel ou exonérées en application des articles 44 sexies, 44 sexies A, 44 septies, 44 octies, 44 octies A, 44 duodecies, 44 terdecies à 44 septdecies peuvent bénéficier d’un crédit d’impôt au titre des dépenses de recherche qu’elles exposent au cours de l’année.

Après le dépôt de la déclaration CIR, les sociétés peuvent être soumises à un contrôle de ce crédit d’impôt dans le cadre d’une vérification (ou examen) de comptabilité opérée par l’administration fiscale.

Aux termes de l’article L.45 B du Livre des Procédures fiscale (ci-après « LPF) et sans préjudice des pouvoirs de contrôle de l’administration fiscale, la réalité de l’affectation à la recherche des dépenses peut être contrôlée par les agents du ministère chargé de la recherche et de la technologie. Un décret n°2013-116 du 5 février 2013 a fixé les modalités de ce contrôle par ces agents (article R.45 B-1 du LPF).

Aux termes de ce décret, les agents sont tenus :

-D’adresser à l’entreprise contrôlée une demande d’éléments justificatifs, tout en garantissant à cette dernière un délai de trente jours pour y répondre.

-De reconnaitre à l’entreprise la faculté de s’entretenir avec l’agent chargé du contrôle lorsque, ne pouvant mener à bien son expertise, ce dernier lui a adressé une seconde demande d’informations complémentaires ;

-Par ailleurs, l’avis émis par les agents chargés du contrôle doit être motivé lorsque la réalité de l’affectation à la recherche est contestée ;

-En dehors de l’hypothèse dans laquelle l’agent chargé du contrôle adresse à l’entreprise une seconde demande d’informations complémentaires, cet agent n’est pas tenu d’engager avec l’entreprise contrôlée un débat oral et contradictoire sur la réalité de l’affectation à la recherche des dépenses prises en compte pour la détermination du crédit d’impôt recherche.

En revanche, la méconnaissance par le Service des dispositions de l’article R. 45 B-1 du LPF telles qu’elles ont été modifiées par le décret du 5 février 2013 ne peut demeurer sans conséquences sur le bien-fondé de l’imposition que s’il est établi que, n’ayant privé l’intéressé d’aucune garantie, elle n’a pas pu avoir d’influence sur la décision de redressement.

Tel n’était pas le cas en l’espèce (Conseil d’État, 9ème – 10ème chambres réunies, 3 février 2021, n°431253), le Conseil d’Etat ayant jugé que le redressement fiscal devait être annulé, la société ayant été privée d’une garantie essentielle. Le contrôle de l’éligibilité du projet développé par la société au CIR n’avait pas été réalisé selon les nouvelles modalités définies à l’article R. 45 B-1. En effet, les agents n’avaient jamais adressé de demandes d’éléments justificatifs ou de demandes complémentaires qui leur auraient permis de mener leur expertise à bien, quand bien même la direction de la recherche et de la technologie avait rendu trois avis successifs sur l’éligibilité du projet en question.

Ainsi, les agents chargés du contrôle doivent rendre un avis aussi éclairé que possible en tenant compte des éléments que la société aura fourni en réponse aux demandes d’éléments et d’informations complémentaires. Ce non-respect privera l’entreprise d’une garantie et pourra justifier, le cas échéant, l’annulation d’un redressement fiscal.